En Guyane, la juriste Doris Tablon appelle à voter blanc à l'élection présidentielle les participants à un barrage, à Rémire-Montjoly, le 12 avril 2017.
Le 19 avril 2017
Traditionnellement porté vers une forte abstention à chaque élection du chef de l'Etat, l'électorat ultramarin pourrait une nouvelle fois confirmer la tendance.
Si le vote des électeurs des DROM-COM (Départements et Régions d'Outre-Mer-Collectivités d'Outre-Mer) n'a jamais pesé sur le résultat d'une présidentielle, et malgré la crainte d'une forte abstention gonflée par la crise sociale en Guyane, les grands candidats ont tous fait le voyage vers l'Outre-mer pendant la campagne.
Décalage horaire oblige, les électeurs ultramarins sont appelés à se rendre aux urnes samedi pour le 1er tour de l’élection présidentielle, à l’exception de La Réunion, de Mayotte et de la Nouvelle-Calédonie, où le vote se déroulera en même temps qu’en métropole.
Passage incontournable dans la course à l’Elysée, l’Outre-mer a reçu durant la campagne la visite des principaux candidats.
Problème : si le vote ultramarin représente 7% de l’électorat français, il n’a jamais fait la différence dans une élection présidentielle.
« L’Outre-mer n’est en rien un outre-vote », relève Yvan Combeau, enseignant en histoire contemporaine à l’université de l’île de La Réunion, dans l’ouvrage collectif qu’il a dirigé, Le vote de l’outre-mer (éd. Les Quatre Chemins, 2007).
Loin d’être monolithique, le vote ultramarin n’en est pas moins très courtisé par les prétendants à la magistrature suprême. Tous sont conscients que la présidentielle peut certes se gagner sans le vote des Ultramarins, mais ils n’ignorent pas qu’en cas de scrutin très serré, ces électeurs pourraient quand même faire la différence.
Il suffirait pour cela que se reproduise un cas de figure plus ou moins similaire à celui du 21 avril 2002, quand seulement 194 600 voix séparaient Lionel Jospin de Jean-Marie Le Pen au niveau national.
Forte abstention ultramarine
Des Antilles au Pacifique en passant par l’océan Indien, la diversité des DROM-COM (Départements et Régions d'Outre-Mer - Collectivités d'Outre-Mer) se reflète aussi dans leur manière de voter.
Les larges plébiscites autrefois accordés à la droite ne sont plus d’actualité.
Convaincus qu’il ne faut pas sous-estimer le poids électoral de l’Outre-mer, les candidats doivent cependant agréger une variable essentielle dans leurs calculs, celle des abstentionnistes.
Car mis à part La Réunion, le vote de l’Outre-mer se distingue à chaque élection présidentielle par une forte abstention.
En 2012, à Mayotte, 51,32% des inscrits ont boudé les isoloirs au 1er tour, suivis par 47,58% des électeurs de la Martinique.
Chiffre quasi identique avec celui de la Guadeloupe qui comptabilisait pour sa part 47,49% d’abstentionnistes.
La Guyane, devenue un sujet de préoccupation chez les candidats depuis l’irruption du mouvement social dans la campagne, affichait il y a cinq ans un taux d’abstention à 49,05%.
Pour comparaison, c’est plus du double des chiffres nationaux, autour de 20%, pour le 1er tour en 2012.
Insurrection sociale
Le vent d’insurrection sociale qui souffle, depuis un mois, sur la Guyane s’est depuis propagé à Mayotte.
Devenue le 101e département français en 2011, l’île de l’océan indien a traversé 15 jours de grève générale au début de ce mois.
Et l’accord trouvé entre le collectif syndical de l’île et le gouvernement semble n’avoir que très peu apaisé les esprits. Une sortie de conflit d’ailleurs vite contredite par de multiples appels à une « île morte ».
Tandis qu’en Guyane, après quatre semaines d'un mouvement social qui paralyse le département, le dialogue a repris mardi soir entre le collectif qui pilote la mobilisation et le gouvernement, avec une tension renforcée sur le terrain après un durcissement des barrages routiers.
Autant de situations de crise qui risquent de ne pas favoriser l'intérêt de l'électorat. Si sur les barrages guyanais on incite à un vote blanc de protestation, d’autres sur les réseaux sociaux appellent à un boycott pur et simple du scrutin.
Quoi qu’il en soit, les électeurs soucieux de voter en Guyane ne pourront le faire sur la base des professions de foi des candidats, la grève générale ayant empêché leur bon acheminement dans les boîtes aux lettres.
"Ils sont à 8000 km des vrais problèmes. Il n'y a qu'à voir ce qui se passe en Guyane... Ici c'était pareil en 2009, les gens ont fait grève pendant 44 jours. En fait, il n'y a eu que des promesses donc à force les Guadeloupéens commencent à voir clair et leur sanction est de ne pas voter."